Le Ballet central de Chine et l'Opéra de Paris : 30 ans de pas de deux

Par : LIANG Chen |  Mots clés : Ballet, l'Opéra de Paris
French.china.org.cn | Mis à jour le 26-06-2015

Le Ballet central de Chine et l'Opéra de Paris : 30 ans de pas de deux

SÉBASTIEN ROUSSILLAT, membre de la rédaction

Rencontre avec Feng Ying, directrice du Ballet central de Chine à l'occasion du gala pour les 30 ans de la coopération entre le Ballet central de Chine et l'Opéra de Paris et des 10 ans du festival Croisements.

C'est pendant les répétitions précédant le gala du 11 mai dans le cadre du festival Croisements que nous rencontrons Feng Ying et les danseurs dans le bâtiment principal du Ballet. Les deux danseurs étoiles de l'Opéra de Paris, Fabien Révillion et Valentine Colasante, pour qui ce n'est pas la première fois à Beijing, sont enthousiastes. « On appréhendait un peu, mais les répétitions se sont très bien passées. On avait chacun répété de notre côté et là, on vient de mettre les choses en place. Les conditions sont idéales », nous explique Fabien. « Je danse avec Ma Xiaodong et Fabien dansera avec Zhu Yan. L'ambiance est super sympa et niveau technique, rien à redire », ajoute Valentine Colasante. Ce n'est pas une première, mais une habitude depuis 10 ans déjà qu'un binôme de danseurs français et chinois se produisent chaque année pour le festival Croisements.

Le lundi soir suivant, à l'ouverture du gala, l'ambassadeur de France a remis l'ordre de chevalier des Art et des Lettres à Feng Ying. Il a loué l'ouverture d'esprit et le soutien sans équivoque de la directrice du Ballet central de Chine au festival Croisements. Dans son discours de remerciement, Feng Ying a appuyé sur le fait que cette récompense pour le Ballet central « marque l'esprit novateur de la troupe, sa malléabilité et son excellence. »

Et empruntant une phrase de Feng Ying décrivant ses années en France : « Pour moi, Paris était comme une valse que tous les gens dansaient ». L'ambassadeur a lancé le gala qui a commencé surLa Chauve-Souris de Strauss et continué sur une suite de classiques du ballet français ou créées spécialement pour le Ballet central par des chorégraphes de l'Opéra de Paris. Au programme : des extraits de L'Arlésienne, de Don Quichotte, de Giselle, mais aussi L'Oiseau de Feu de Maurice Béjart ainsi que des pièces originales de Roland Petit, Bertrand D'At et Patrick de Bana créées spécialement pour le Ballet central de Chine.

Les pas de deux sino-français ont rayonné de virtuosité et de souplesse pendant tout le spectacle et ont su s'attirer les hourras du public venu en nombre. L'ambiance était festive et enthousiaste, les applaudissements étaient accompagnés de « bravos » et autres sifflets et les cris d'exclamation à la vue des prouesses techniques des danseurs ne se comptaient plus. Le rappel a duré plusieurs minutes où les danseurs, une centaine, sont tous montés sur scène pour remercier le public avant que le rideau ne tombe et qu'on entende dire « On en voudrait encore ! »

Des entrechats sino-français

Le partenariat entre le Ballet central de Chine et l'Opéra de Paris existe officiellement depuis 1985. Mais il avait commencé quelques années auparavant. « En 1980 déjà, le Ballet central, seul troupe d'envergure internationale de Chine, avait importé la version de l'Opéra de Paris du ballet Sylvia, qui est depuis resté un classique de notre répertoire », nous explique Feng Ying. Celle-ci revient sur les débuts de la coopération. À l'époque, elle était danseuse étoile du Ballet central : « Après la visite du président Giscard D'Estaing en Chine, il y a eu un début de coopération et j'ai moi-même été bénéficiaire de cet échange, puisqu'en 1982, j'ai été envoyée à Paris pour étudier un an à l'École de danse de l'Opéra de Paris. J'ai eu par la suite l'occasion d'interpréter Don Quichotte par Rudolf Nureyev lors de sa venue à Beijing en 1985, de danser avec l'Opéra de Paris en tant qu'artiste invitée et de suivre les cours de Maurice Béjart. ». Depuis 10 ans, dans le cadre de Croisements, le Ballet central invite des danseurs étoiles de l'Opéra de Paris à venir participer à un gala avec ceux du ballet chinois mais aussi hors Croisements, pour la saison artistique chinoise et des tournées dans tout le pays.

Le Ballet central a également l'occasion de se produire en France, sur invitation de l'Opéra de Paris et d'envoyer des danseurs en France pour approfondir leur connaissance de la danse. C'est entre autres le cas de la danseuse étoile Wang Qimin qui a passé un an à l'Opéra de Paris en 2004 et a ensuite coopéré à plusieurs reprises avec le chorégraphe Roland Petit, lui-même régulièrement venu en Chine pour travailler avec le Ballet central. Plusieurs pièces créées spécialement pour celui-ci par Roland Petit ont d'ailleurs été présentées lors du gala du 11 mai.

Une fenêtre ouverte sur la création

Feng Ying nous explique comment est organisée la collaboration entre le Ballet central et l'Opéra de Paris. « Chaque année, nous avons un échange, soit de danseurs étoiles, soit de chorégraphes. Quand ce sont les danseurs, on fait des binômes. L'échange est facile puisque la langue du ballet, c'est le français, et puis les techniques sont similaires. Les danseurs chinois ont beaucoup appris depuis le début de la coopération. Au début, nous avons assimilé le ballet romantique : Giselle, Don Quichotte, ou encore Sylvia, puis des choses plus contemporaines par la suite. Quand ce sont les chorégraphes qui viennent, on leur demande de nous enseigner les chorégraphies de tel ou tel ballet, ou bien on leur propose de créer un ballet ou une pièce sur un thème lié à la Chine », nous explique Feng Ying. Pour la première édition du festival Croisements par exemple, un chorégraphe français avait créé une pièce intitulée Mélange dans laquelle il avait lié musique chinoise et ballet.

Une relation particulière s'est créée avec le chorégraphe français Roland Petit, dont beaucoup de chorégraphies ont été présentées durant le gala : « Roland Petit est un grand ami du Ballet central, il venait très souvent pour travailler avec nous. Notre danseuse étoile Wang Qimin a été son élève de très nombreuses années », ajoute Feng Ying. Comme nous le décrit la directrice du Ballet central, cette collaboration est aussi l'occasion pour les danseurs de découvrir du répertoire plus contemporain : « Cela nous a fait connaîtreL'Oiseau de Feu par Maurice Béjart ou encore créer des chorégraphies avec des Bertrand D'At qui a concocté en 2012 un ballet sur Le Chant de la Terre de Mahler qui s'inspire de poèmes de Wang Wei , Li Bai et Meng Haoran. Ou encore des chorégraphies sur The Great Gig in the Sky de Pink Floyd grâce à Roland Petit. »

Évidemment, cela représente aussi un moyen pour les chorégraphes français de découvrir le niveau artistique de la troupe chinoise. Roland Petit s'exclamait d'ailleurs en 2005 lors de sa venue en Chine pour faire répéter son Carmen : « J'ai été tout à fait ébahi de découvrir que le Ballet central compte des artistes de grand talent, surtout parmi les femmes. Leur niveau est absolument comparable à ce qui se fait de mieux au plan international. Il y a aussi plusieurs danseurs masculins qui sont très bons.»

Retour aux sources

La collaboration avec l'Opéra de Paris permet à la troupe d'être régulièrement invitée dans l'hexagone et c'est un symbole pour les danseurs. « La France est le berceau du ballet classique mais aussi du ballet contemporain. Quand on part tourner en France et surtout à Paris, c'est un peu comme un pèlerinage », nous explique-t-elle. « Pour nous, la tournée la plus marquante a été celle de janvier 2009 où nous avons été invités à donner une représentation au Palais Garnier. Nous y avons joué Le Détachement féminin rouge, pièce mythique de notre répertoire et Sylvia, la première pièce française que le Ballet central ait importée. L'Opéra de Paris est notre partenaire depuis longtemps, mais c'est aussi le représentant du ballet français, c'était un moment d'anthologie pour les danseurs de notre troupe. », nous dévoile-t-elle.

Plusieurs tournées ont ainsi eu lieu. En 1986 et en 2003 où le Ballet central a respectivement tourné dans toute l'Europe pendant une cinquantaine de jours, en 2009 et en 2013 au théâtre du Châtelet et dans plusieurs villes françaises, et enfin en 2014 pour le cinquantenaire des relations diplomatiques Chine-France au Grand Palais à Paris. Les tournées du Ballet central de Chine sont souvent très attendues en France, car la troupe présente des pièces qu'elle seule possède à son répertoire et un style lyrique, souple, très ordonné mais aussi assez spectaculaire typique du ballet chinois.

Malgré la pression de jouer devant un public étranger averti et parfois très exigeant dans cet art typiquement occidental, « à chaque tournée nous obtenons de bons retours du public. Notamment en France, on nous dit souvent que nos danseurs sont techniquement irréprochables, très en rythme et que nos danseuses sont très gracieuses et souples, nos danseurs hommes lyriques et spectaculaires ».

Une renommée internationale

Le Ballet central, créé en 1959, a beau être l'un des plus jeunes du monde, il est aussi l'un des plus connus et ce, sûrement pour ses ballets originaux tels que Le Détachement féminin rouge ou encore La Fille aux Cheveux blancs. Aujourd'hui encore, celui-ci innove grâce à sa directrice artistique, qui faisant partie de la génération de danseurs chinois post-Révolution culturelle, souhaite que le ballet se popularise en Chine et reflète l'internationalisme et la modernité de la troupe. Elle a donc créé un workshop et développé de nombreuses nouvelles productions complètement originales pour le Ballet central : « Nous avons créé plusieurs ballets originaux, c'est la tradition de notre troupe depuis les années 60, récemment, j'ai mis en scène Le Pavillon des Pivoines, L'Âme de la Grue et nous donnons des représentations dans les écoles, les universités pour populariser l'art du ballet, les classiques et des choses un peu plus contemporaines. Nous tournons à l'étranger pour mieux faire connaître la culture chinoise au public étranger. » C'est pour cela qu'à chaque tournée, le Ballet central donne généralement un ballet typiquement chinois et un classique occidental du ballet.

Avec plus de 150 représentations annuelles en Chine et à l'étranger, c'est l'un des ballets les plus demandés du monde. « Rien que pour cette année, hormis la rétrospective pour le festival Croisements, nous allons faire une série de représentations au Lincoln Art Center à New York en juillet, puis nous produire à Helsinki, et aux Philippines. Ensuite, nous avons une série de spectacles en Chine et nous organisons en novembre la China International Ballet Season lors de laquelle nous invitons généralement plusieurs grands ballets étrangers à venir se produire dont évidemment le ballet de l'Opéra de Paris », conclut Feng Ying.

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